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Question 1

Quelle place le régime dit concordataire accorde-t-il aux non-croyants ?

Francis MESSNER

Le régime dit concordataire n'accorde aucune place aux non-croyants, il est d’ailleurs difficile d'accorder une place aux non-croyants en tant que telle, puisque c'est une population qui rassemble à la fois des agnostiques, des indifférents, des athées et des libres-penseurs. Mais dans certains pays, effectivement, les athées, les humanistes, les libres-penseurs ont un statut équivalent à celui des cultes et des religions. 

Messner 01

Valentine ZUBER

À la question de savoir quelle place le régime concordataire, qui est en vigueur en Alsace Moselle, accorde aux non-croyants, il faut avoir une approche très historique. Parce que ce régime concordataire, donc de relations entre l'État et les cultes, ne concerne que les relations entre l'État et les cultes. Et donc à l'époque, au début du 19e siècle, il n'y avait pas de non-croyants déclarés en France, ni en Alsace, ni en Moselle et donc les non-croyants ne sont pas pris en compte.

Zuber 01

Pierre KRETZ

Je crois que le régime concordataire ignore les non-croyants. Il y avait, bien sûr, des non-croyants lorsque le concordat a été signé, Voltaire était quand même passé par là. Il y avait, bien sûr, des non-croyants dans le mouvement socialiste du 19e siècle, mais enfin, on les ignorait. Il y avait, bien sûr, des non-croyants, même en Alsace en 1870 lorsque nous sommes devenus allemand, mais ils n’avaient pas voix au chapitre puisque c’était les trois cultes qui s’étaient mis d’accord pour défendre le concordat. Il y avait, bien sûr, des non-croyants en 1918 lors du retour à la France, puisqu’il y avait un mouvement communiste très important en Alsace, surtout à Strasbourg, dans les années 1918-1920, et ils étaient bien sûr des non-croyants, mais le régime concordataire les ignorait et eux ignoraient le régime concordataire.

Kretz 01

Sylvie LE GRAND

Alors… La réponse à cette question est complexe je trouve, tout dépend de ce dont on parle. Si on considère le texte du Concordat de 1801 on peut dire que les croyances autres que le catholicisme sont seulement évoquées en creux dans l'expression bien connue figurant en préambule. Le gouvernement de la République reconnaît que la religion catholique apostolique et romaine est la religion de la grande majorité des citoyens français. Donc s’il y a une majorité cela signifie qu'il y a aussi une minorité mais qui n'est pas qualifiée dans le texte. Donc il y a là une reconnaissance du pluralisme des convictions dans la société. Le catholicisme n’est plus religion d'État, mais ce qui me frappe c'est le caractère factuel de la formule : il s'agit plus d'une observation sociologique en quelque sorte. Avec les lois organiques qui ont suivi le Concordat, d'autres cultes que le catholicisme - les cultes protestants (luthériens d'un côté, réformés de l'autre) et le culte israélite - ont obtenu aussi le statut de cultes reconnus. Mais si on veut répondre à la question en la comprenant de manière plus générale, c'est-à-dire en la comprenant d'une façon susceptible de concerner tout type de régime concordataire, il me semble que pour répondre à cette question il faut se référer à d'autres textes et en particulier à la Constitution de l'État considéré. Il est nécessaire d'examiner je pense formellement et concrètement comment la liberté de conscience est garantie et si on considère le régime concordataire dans la France actuelle on doit donc se référer à l'article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 incorporé dans la constitution de 1958 qui garantit donc la liberté de conscience et des opinions, même religieuses, avec cette petite réserve du « même religieuse » qui nous montre un peu toute la distance et la méfiance vis-à-vis des religions qui fait partie de la tradition française. Mais on peut et on doit aussi considérer que la France, ou d'autres États par exemple quand on considère d'autres régimes concordataires, se sont engagés à respecter des textes internationaux par exemple. Donc il faut les prendre en compte, si on veut parler de la place accordée aux non-croyants et si l'on veut s'intéresser à la liberté de ne pas croire justement. Et ces textes par exemple, concernant la France, c’est notamment la Convention européenne des droits de l'Homme et son article 9 ou la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et son article 10.

Le Grand 01

Lucien JEAUME

Pour répondre à la première question sur la place que le régime concordataire accorde aux non-croyants, je dirais tout de suite que je ne suis pas spécialiste de la question du Concordat même si je siège au conseil d'administration de l'Association du Droit constitutionnel depuis plus de 30 ans en tant que philosophe. Mais il me semble que le régime concordataire ne peut pas imposer une éducation religieuse ou une croyance quelconque aux non-croyants. Pourquoi ? Parce que la constitution de la Ve République s'impose partout, y compris en Alsace Moselle bien sûr et comme nous le savons tous la République est déclarée laïque par l'article 2. Je relis l'article 2, qui est très intéressant « la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. » Évidemment dans le cadre de la limite des lois. Les croyances fascistes je ne pense pas que la République ait à les respecter aujourd’hui, il est bon de rappeler cela. Alors la liberté de conscience, qui signifie la liberté de croire ou de ne pas croire, s'applique donc sous le régime concordataire aux croyants et aux non-croyants. C’est, je dirais, leur bien commun, pour employer une notion plutôt catholique d'origine. C'est leur bien commun dans le cadre de la République laïque. Mais du fait de l'obligation de l'enseignement religieux à l'école et pour d'autres raisons, notamment des raisons financières, vous savez que certaines personnes et certains groupes réclament l'alignement de l'Alsace Moselle sur le régime dit de la séparation d'après la loi 1905, la loi de séparation des Églises et de l'État. Ces personnes pensent en effet que puisque l'école est le lieu d'apprentissage de la laïcité à la française, c'est-à-dire de la laïcité de type républicain, il faut donc laïciser les écoles de ces départements et il faut donc sortir maintenant du Concordat, voilà, c'est une opinion.

Jaume 01

Eliette ABEDECASSIS

Je pense que le régime concordataire accorde la place aux non-croyants que tout régime démocratique octroie à ceux qui ne veulent pas suivre le Concordat c'est-à-dire la possibilité simplement de s'exprimer. Et c'est une possibilité de s'exprimer qui est universelle, qui est celle des croyants de pouvoir être à l'aise dans leur société, dans leur cité, de pouvoir avoir certains droits et certains devoirs aussi mais bien sûr je ne vois pas exclus les non-croyants pour autant.

Abecassis 01

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